LE PUITS : ÉPISODE 12 : Camionnette suspecte


 

ÉPISODE 12 : Camionnette suspecte 

Dimanche 7 février 2021

 

Le commissaire Vétoldi réfléchit aux informations que vient de lui transmettre Johny Demanche, le vigile posté près de la porte centrale de l’hôpital. Il y a la porte des urgences, la porte de l’intendance pour la livraison des marchandises et la porte d’accès à l’appartement de fonction du directeur. Au lieu de demander à Rosine où se situent ces différentes portes, le commissaire Vétoldi commence par faire le tour du bâtiment en empruntant les couloirs qui longent les murs extérieurs du bâtiment. Il s’arrête devant une porte métallique coupe-feu munie d’une énorme poignée basculante. Voilà une porte qui ressemble à une porte de service. Il s’en approche, appuie sur la poignée, elle s’ouverte. Elle donne sur la cour arrière de l’hôpital, un camion est rangé sur le petit parking. Il s’avance vers le camion et derrière lui, la porte se referme. Il vérifie, oui, c’est ce qu’il pensait, on ne peut pas entrer depuis l’extérieur par cette porte sans sonner ou sans avoir un pass. Un écriteau est posé au-dessus du chambranle : 

ACCÈS RÉSERVÉ 

AUX LIVRAISONS

Il n’y a pas de conducteur au volant du camion. Par habitude, le commissaire Vétoldi note le numéro d’immatriculation. Il prend aussi une photo. C’est un Mercédès blanc. Il essaie d’ouvrir la porte arrière, celle qui sert pour le chargement des marchandises, mais elle est fermée à clé. Il appelle Rosine et lui demande s’il peut joindre l’intendant.

— L’intendant ? Vous voulez dire Madame l’intendante, Madame Martin ? 

— Oui, l’intendant, qu’elle soit une femme ou un homme ne m’intéresse pas, je souhaite m’entretenir avec elle.

— OK, je vais vous la passer. À plus tard, Monsieur le commissaire. 

— Merci chère Rosine.

Au mot de chère, il imagine Rosine devenir cramoisie et cela le fait sourire. Quelques secondes plus tard, il a madame Martin au bout du fil. 

— Bonjour Commissaire Vétoldi, on me dit que vous voulez me parler ? C’est à quel propos ? 

— Eh bien, je préfèrerais si cela vous est possible, vous poser quelques questions en face à face car pour le moment, je me trouve à l’extérieur de l’hôpital, devant la porte des livraisons;

— Qu’est-ce que vous faites là ? Vous ne pouvez pas entrer par cette porte, il vous faut regagner la porte centrale que vous n’avez pas pu ne pas voir en arrivant.

— Écoutez, je m’y trouvais tout à l’heure et je suis sorti par la porte des livraisons pour une raison que je vais vous donner. Pourriez-vous m’y retrouver ?

— Bon, d’accord, je viens vous chercher.

Madame Martin raccroche, voilà un drôle de commissaire ! Mais la police a tous les droits et elle n’a pas envie de se faire taper sur les doigts par le directeur de l’hôpital avec lequel elle est déjà en froid, justement à cause de certaines livraisons. Elle quitte son bureau en prenant soin de fermer sa porte à clé, il y a tellement de vol dans cet hôpital, comme dans tous les hôpitaux d’ailleurs… Avec ses collègues de Bretagne; elle a participé récemment à une réunion consacrée à ce problème avec des responsables de la sécurité dans les bâtiments publics et plus spécifiquement dans les hôpitaux. Elle s’engage dans l’ascenseur de service et se retrouve dans le petit couloir qui mène directement à la porte des livraisons. Elle actionne la poignée basculante et la voilà sur le parking. Le commissaire Vétoldi vient la saluer. Surprise par la présence de la camionnette, elle s’exclame :

— Ce camion, que fait-il à cet endroit, l’heure des livraisons est passée. Ces chauffeurs se croient tout permis, je vais appeler le chef des vigiles pour qu’il me règle cette affaire.

— N’en faites rien, je me demande si le chauffeur n’est pas dans les murs de l’hôpital, prêt à commettre un acte répréhensible.

— Comment cela ? Vous croyez ?

— Je le suppose. Rosine, à l’accueil, m’a signalé il y un quart d’heure, la présence d’un individu louche qui a demandé quel était le numéro de chambre de Madame Demurget. Or cette femme a été hospitalisée à la suite d’une agression qui aurait pu être mortelle. Il n’est pas impossible que le conducteur de ce véhicule soit en relation avec les agresseurs de la jeune femme.

Quelle horreur ! Madame Martin est accablée tout à coup. Jamais elle n’aurait pensé qu’en prenant un poste d’intendante d’hôpital après avoir occupé plusieurs emplois successifs en tant qu’intendante de lycée ? Après tout, le commissaire est là et c’est son job de résoudre le problème qui se pose : 

— Alors que proposez-vous ?

— Avez-vous des caméras qui filment en permanence les entrées et également à l’accueil ?

— Oui, bien sûr. Il nous est arrivé d’avoir des visiteurs dangereux. 

— Bien, il me faudrait la copie des images enregistrées aujourd’hui.

— Pas de problème, je demanderai à la société qui gère la vidéo de vous les fournir. 

— Merci, je vais donner l’ordre de faire enlever ce camion pour l’emporter jusqu’au parking du commissariat. Il subira ensuite un examen minutieux par un technicien de l’investigation criminelle. Avez-vous la possibilité de bloquer la porte à l’intérieur de façon que personne ne puisse sortir par là ? 

— Non, c’est une porte de secours, en cas d’incendie, elle ne peut être condamnée dans ce sens. C’est une pièce maîtresse en cas d’incendie pour permettre l’évacuation du personnel et des patients. 

— Il faudrait demander à un des vigiles de monter la garde à cet endroit.

— Mais ils ne sont que deux en permanence, un à la porte centrale et l’autre qui effectue des rondes.

— Vous pourriez demander du renfort à la société de surveillance ? 

— Et qui paierait ? Pourquoi vous ne mettriez pas un policier à surveiller ? 

— Oui, je vais le faire mais cela aurait été plus simple et plus rapide de poster un vigile.

— C’est tout ce que vous vouliez savoir, Monsieur le commissaire ? Parce que moi, j’ai un travail à terminer. 

— Oui, je n’ai pas d’autre question, enfin pour le moment. 

Une fois Madame Martin partie, le commissaire Vétoldi appelle le service d’investigation criminelle pour qu’on lui envoie le plus vite possible, un technicien, puis il met au point avec son adjoint Kevin Auster, la surveillance de la porte des livraisons. Il téléphone au directeur de l’hôpital via Rosine. 

— Décidément, commissaire, vous me faites travailler aujourd’hui ! Méfiez-vous, je vais bientôt partir, je suis presque au bout de mes heures. 

— Je vous remercie, Rosine pour votre aide, la justice vous sera reconnaissante d’avoir participé à pourchasser un malotrus.

— J’espère que j’aurai une médaille.

— Eh bien peut-être, si tout ceci débouche sur l’arrestation de l’individu que vous suspectiez tout à l’heure. Pour ma part, je m’engage à tout faire pour que vous soyez récompensée. Bien, vous me passez le directeur ?

— Oui, bien sûr, Monsieur le commissaire, tout de suite.

Le commissaire Vétoldi met le haut-parleur, puis fait les cent pas en attendant que le directeur de l’hôpital prenne l’appel. Quelques minutes passent puis, la voix d’homme résonne :

— Bonjour Monsieur le commissaire, vous voulez me parler ?

— Oui, bonjour Monsieur le directeur. Je vous signale que je suis contraint d’organiser la surveillance de votre établissement. Vous avez actuellement une jeune femme hospitalisée qui pourrait courir un grave danger. J’ai demandé à Madame Martin si elle pouvait recruter des vigiles supplémentaires mais elle m’a opposé un refus catégorique en me disant qu’elle n’avait pas les moyens pour le faire et elle m’a demandé pourquoi je ne l’organisais pas. C’est donc ce que je viens de faire. Un policier de mon commissariat va arriver d’une minute à l’autre. 

— Madame Martin a eu tout à fait raison, nous avons de gros problèmes de budget et l’horizon est plutôt sombre. C’est déjà très bien par rapport à beaucoup d’autres établissements que nous ayons pu signer un contrat avec une société de surveillance et avoir ainsi deux vigiles en permanence. Pour vous répondre, je m’aligne sur la réponse de mon intendante, je n’ai pas les moyens de dépenser plus d’argent dans la surveillance de mon hôpital. Je compte sur la police nationale pour faire face aux situations exceptionnelles comme celle dont vous parlez, à savoir la jeune femme qui a subi une grave agression. 

 Bien, je vous ai dit tout à l’heure que j’organisais la surveillance par des policiers. Je vous explique. Cette jeune femme a été agressée, elle aurait pu perdre la vie dans cette agression, elle reste une proie pour ceux qui voulaient l’assassiner. Voilà pourquoi je me sens obligé de la défendre, de la protéger et la raison ne tient pas qu’à elle seule. En effet, ses agresseurs tant qu’ils n’auront pas été mis hors d’état de nuire peuvent agresser d’autres femmes… 

— Vous avez entièrement raison et vous avez carte blanche pour circuler dans mon établissement et prendre toutes les décisions qui peuvent améliorer la sécurité de l’hôpital. Je vous apporterai toute l’aide et tout le soutien dont vous pourriez besoin, mais dans la limite de mes moyens. 

— Merci Monsieur le directeur, je vous tiendrai au courant. 

Le commissaire Vétoldi s’impatiente, son remplaçant n’est toujours pas là, l’envie le démange de rappeler l’inspecteur Auster mais il se retient car il sait que ce dernier n’apprécierait pas et que cela risquerait de nuire à leur relation qui est déjà assez difficile…


À Suivre… Prochain épisode le Dimanche 14 février 2021…