Épisode 8 : Vétoldi-Nathan rencontre FCG, président du groupe d’amitié France-Espagne

Vendredi 3 novembre 2 017 
Épisode 8 : Vétoldi-Nathan rencontre FCG, président du groupe d’amitié France-Espagne
L’échange que Vetoldi avait eu la veille avec les huissiers qui avaient bien connu Hugues d’Arborville (HDA), lui avait appris quelques petites choses sur le quotidien parisien du député.
HDA était réputé pour son sérieux, les huissiers s’étonnaient qu’il n’ait pas d’assistant parlementaire à Paris. Ils le voyaient faire lui-même ses photocopies, se rendre au secrétariat de son groupe, consulter le service de la documentation, filer à la bibliothèque, bref courir partout. Il était sportif, allait régulièrement faire son entraînement à la salle de sports de l’Assemblée. Mis à part les députés qui appartenaient au même groupe parlementaire que lui, il n’était pas proche des autres députés, y compris de ceux qui étaient aussi anciens que lui. Il était toujours poli mais conservait une certaine distance. Princier, avait dit la dame huissière de l’étage, Gisèle Despoux, ce qui avait fait sourire son collègue qui avait opiné du chef : Oui, princier est bien le terme qui convient. Dominique Vétoldi avait souri également, mais en pensant qu’il aurait employé un mot moins policé, comme prétentieux par exemple.
Ce matin, à dix heures trente, il avait rendez-vous avec Fabrice Carré-Garcia, le président du groupe d’amitié France-Espagne. Il se rendit dans son bureau, le député l’attendait, ils se saluèrent et Vetoldi-Morin lui posa la première question :
– Comme vous le savez, je mène une enquête en tant qu’ethnologue sur la vie des députés. Je ne suis pas à L’Assemblée depuis longtemps mais ce qui me frappe, c’est l’emploi du temps très chargé des députés en général, leur double vie, surtout celle de ceux qui sont élus de province comme vous l’êtes vous-même. Comment parvenez-vous à concilier vos vies, celle de Paris, celle que vous passez à Saint-Dizier ? J’imagine que ce doit être très compliqué d’être à la fois sur le terrain dans votre circonscription et ici à l’Assemblée ?
– Oui, c’est compliqué et fatigant et encore plus depuis le nouveau président. Il s’arrêta, sourit et demanda à Nathan Morin :
– Au fait, vous connaissez le surnom donné au président ?
– Non, je n’en ai aucune idée !
– J’aurais pu essayer de vous le faire deviner mais je crois que vous n’y seriez pas arrivé, c’est Choupinet. Je crois que c’est parti des malheureux candidats socialistes qui n’ont pas trahi leur parti, entre la Présidentielle et les Législatives. Ils l’avaient surnommé Choupinet 1er. Maintenant, tout le monde à l’Assemblée l’appelle Choupinet.
– Effectivement je ne risquais pas de deviner. C’est peu respectueux de sa haute fonction, et de l’idée qu’il s’en fait, quand je pense à tous les efforts qu’il effectue pour endosser sa position de chef d’Etat, il ne doit pas vraiment apprécier. 
– Bon, vous avez d’autres questions plus sérieuses ? A propos, vous ignorez peut-être que les députés les mieux réélus sont ceux qui sont les moins assidus à l’Assemblée, autrement dit, ce que le peuple veut, c’est avoir son député auprès de lui. Paris est loin pour les électeurs de province.
– Vous-même, comment vous organisez-vous entre Paris et Saint-Dizier ?
– J’arrive ici le mardi matin, et je repars soit le jeudi soir, soit le vendredi matin, en fonction de mon emploi du temps. Cela me permet d’être très présent dans ma circonscription et c’est la raison pour laquelle j’ai pu être réélu malgré le tsunami du parti de Choupinet qui n’aurait pas dû s’appeler En Marchemais Au galop ! En prime, on aurait pu nommer les députés les galopins, ce qui leur aurait bien convenu étant donné la jeunesse de beaucoup d’entre eux.
– Il est vrai que vous êtes peu nombreux à avoir été élus comme vous depuis 1993.
– Exact, du coup, notre ancienneté nous rapproche, au-delà de nos appartenances politiques. Je ne suis pas certain que le parti EM restera majoritaire, je suis même persuadé qu’il éclatera avant les cinq ans. Vous y retrouvez des gens de tous bords, il y a des anciens socialistes qui grimpent au x rideaux quand on leur fait avaler la couleuvre de la réforme de l’impôt sur les grandes fortunes, les nouveaux qui sont éblouis de se retrouver députés alors qu’ils n’ont jamais été élus auparavant et qui vont eux, s’accrocher à leur étiquette, quelques élus de droite qui jouent l’opportunisme… Bref on devrait parler d’un magma plutôt que d’un parti. A mon avis, il ne devrait pas tarder à y avoir des divergences de vue de plus en plus importantes.
– Vous ne parlez pas du groupe des Néo-Royalistes ?
– Ils sont si peu nombreux, certes, on les entend… Enfin, on les entendait, car on va moins les entendre depuis que leur président à voix de stentor est parti dans l’autre monde… Drôle d’histoire, je ne le savais pas malade. Je le connaissais depuis 1993, il était un des plus vieux élus de l’Assemblée. Un peu illuminé, mais sympathique et d’une politesse exquise, qu’on ne voit plus de nos jours.
– Il faisait partie du groupe d’amitié France-Espagne que vous présidez, pour quelles raisons ?
– Il s’intéressait à la culture espagnole et le rétablissement de la royauté, réussie en Espagne, lui donnait des espoirs pour la France.
– Vous organisez des voyages en Espagne ?
– Bien sûr, les échanges entre nos deux pays sont à la base de la vie de notre groupe, nous avons été reçus à plusieurs reprises par le premier Ministre, et même par le Roi d’Espagne. Nous recevons aussi les députés espagnols.
– Comment se comportait-il en voyage ?
– Très bien, il a été évidemment très intéressé par la réception du Roi et le Roi l’a convié à un repas privé lors de notre dernier séjour.
– C’était quand ?
– Un peu avant les élections, en février.
 Pensez-vous que des espagnols puissent être opposés à la royauté dans leur pays ?
 Oui, bien sûr et particulièrement les Catalans qui contestent le roi et revendiquent leur indépendance.
Vétoldi-Morin engrangea cette information, mais jugea plus prudent de ne pas insister, pour ne pas mettre la puce à l’oreille du député.
 En dehors de la présidence de votre groupe d’amitié, et de vos engagements politiques, pratiquez-vous une activité autre à l’Assemblée, on m’a parlé de la salle de sports, vous arrive-t-il de vous y rendre ?
– Oui, et j’y retrouvais souvent Hugues qui y était très assidu. Qu’il soit mort d’une crise cardiaque m’étonne vraiment, il avait le cœur d’un champion. Enfin, il avait peut-être des soucis personnels que j’ignorais, c’était quelqu’un qui ne parlait jamais de lui, et vous savez, peu de députés parviennent à avoir une vie de famille paisible, ils sont très nombreux à divorcer. Bien, dites-moi, j’ai une réunion, je dois vous laisser, je vous souhaite une enquête enrichissante et reste à votre disposition pour un autre rendez-vous.
Il s’était levé et Dominique Vétoldi-Nathan Morin en fit autant.
– Je vous remercie infiniment, Monsieur le député d’avoir accepté de me recevoir. 
– Mais je vous en prie, cher Monsieur, c’était un plaisir, et je vous souhaite une excellente journée.
– Bonne journée à vous aussi, au revoir Monsieur le député.
Dominique Vétoldi-Nathan Morin sortit du bureau de FCG et prit la direction de son bureau où il espérait avoir reçu une autre réponse à ses emails, mais si ce n’était pas le cas, il commencerait à faire le tour des services administratifs de l’Assemblée, en essayant d’en apprendre le plus possible sur la vie des députés mais plus particulièrement sur la vie d’HDA.  Ne pas laisser découvrir sa véritable mission allait devenir de plus en plus délicat…
A suivre…

Prochain épisode le vendredi 10 novembre…