LE PUITS – ÉPISOE 1 : OÙ SUIS-JE ?

 

ÉPISODE 1 – OÙ SUIS-JE ?

 

 

Mes tempes résonnent dans ma tête comme des cloches incontrôlées, boum, boum, boum. Le sang cogne si dur, il va faire éclater ma peau. Ma tête va exploser. Mon souffle est haletant, court, comme s’il était sur le point de s’arrêter. C’est ça, la mort ? 

Il faut que je sache : je suis morte ou je suis vivante. 

Je tente de soulever un bras, ma main, que se passe-t-il ? Une douleur effroyable m’arrête. Mes mains sont enserrées par quelque chose de dur. Il faut que je voie, que je regarde. Je dois ouvrir les yeux. J’essaie mais mes paupières collent. Je presse mes yeux très fort, ils sont si secs. Je recommence à presser pour qu’un peu de larmes arrivent et me sauvent. Où sont-elles passées ? Ça y est, elles s’entrouvrent, mais il fait si noir. Où suis-je ? Est-ce qu’i m’est arrivé ce que je crains depuis toujours, ai-je été enterrée vivante  ? Cette pensée me glace, je réalise que j’ai très froid. Si je sens le froid, c’est que je ne suis pas dans une tombe mais dans un ailleurs, quelque part. Je referme les yeux et presse et rouvre et presse. Peu à peu, mes yeux s’ouvrent plus grand. Il fait si sombre autour de moi. Où suis-je ? Au fond d’un trou…

 J’ai mal partout. J’essaie de bouger mon bras, je pousse un cri, la douleur me transperce. Mes poignets me font si mal, ils sont attachés avec des bandes d’un épais sparadrap. Mon regard glisse sur mes pieds, attachés eux aussi. 

Un mur de pierre m’entoure. Il fait si sombre. Un faible rayon de lumière arrive d’en haut. J’essaie de faire le vide dans mon cerveau. À quoi ressemble cet endroit ? À quoi le comparer ? 

Oui, j’ai trouvé, il ressemble à un puits sans eau. Non, de l’eau, il y en a un tout petit peu, là, sous mes pieds. Je passe ma langue sur mes lèvres desséchées, j’ai si soif. Ma gorge aussi me fait souffrir. De l’eau, il me faut de l’eau ! Comment faire pour atteindre cette eau sous mes pieds ?

Je déplie lentement mes doigts engourdis, puis je tente de dégager un peu mon poignet droit. j’écarte, je reviens, j’écarte, je reviens, combien de fois ? Je ne sais pas. Un léger espace se dessine entre mes deux poignets. L’espoir naît. Je dois poursuivre mes efforts. J’essaie de rassembler ce qui me reste de vie. Tout mon être est maintenant branchée sur ce but : libérer mes poignets, c’est une priorité, ensuite quand j’aurai récupéré le mouvement de mes mains, je pourrai boire. Assouvir ma soif devient mon obsession. C’est la clé de ma survie. 

Les efforts m’épuisent. J’ignore combien de temps a passé depuis que j’ai commencé à tirer sur mon poignet. J’ai si mal. Il faut que cesse cette douleur. Je hausse les épaules, ça, j’y arrive, mais à quoi ça me sert ? À rien sans doute, mais ça me fait du bien. Si, bien sûr que ça me sert ? Mes épaules fonctionnent ! Une partie de mon corps fonctionne. Ça me donne des idées. Je tourne ma tête vers la gauche puis je reviens au centre puis vers la droite et encore et encore. Mon cou m’appartient. Si seulement je pouvais boire, je suis certaine qu’alors je pourrais commencer à imaginer une solution pour me sortir de là. Je me remets au travail, ce sparadrap, comment le décoller ? Il faut que je réfléchisse. J’ai un espace entre les poignets, quand il sera plus important, je pourrais glisser ma main droite et j’arriverai à la sortir de là. C’est si long. Pour me redonner espoir, je regarde sous mes pieds l’eau qui jette des reflets. Pourvu que ce ne soit pas un mirage. L’image de Tintin dans le désert me revient. Il voit l’eau, elle est là, à portée de ses yeux, il veut courir, il court mais elle lui échappe et il tombe. L’eau, est-elle là ou ai-je une hallucination ? 

Si je suis capable de me poser cette question, c’est que je suis consciente et si je suis consciente, c’est que c’est la réalité, là, cette eau sous mes pieds et que je suis vivante. JE SUIS VIVANTE ! Oui, mais pour combien de temps si je ne parviens pas à boire ? Mes pieds aussi sont prisonniers, mes chevilles sont attachées, j’essaie de les bouger. Je reviens aux mains, puis aux pieds. Ça m’aide ces allers et retours. Le temps passe et je sens mes forces s’évanouir peu à peu. Je suis fatiguée, tellement fatiguée. 

Mes paupières se ferment, je vais m’endormir, je veux m’endormir, ne plus penser. Je sursaute, un éclair de lucidité me traverse, si je me laisse aller au sommeil, c’en sera fini du peu de vie qui me reste, je vais mourir. J’ai pas envie de mourir. Alors je retourne à mes poignets, le sparadrap se soulève, je vais y arriver. Du côté des pieds, je n’ai pas beaucoup avancer mais c’est pas grave, une fois que j’aurai mes mains, elles m’aideront. 

Je continue mes efforts et l’espace libre entre mes poignets s’élargit. Je tente de faire glisser ma main droite comme je l’ai imaginé tout à l’heure. Ça passe, presque ! 

Encore quelques efforts et j’arriverai au but. Je soupire, mon cœur bat violemment. 

Je m’arrête un moment pour reprendre des forces, j’essaie de calmer ma respiration, de la faire plus profonde mais je suis tellement oppressée. Mon souffle est court, saccadé, comme si mes poumons étaient bridés. Dans un ultime effort, je tire violemment sur ma main droite, la douleur me transperce, mon poignet me fait si mal… J’attends que ça passe un peu, je bouge très doucement ma main, elle m’obéit, elle est libre ! Je suis libre ! 


À Suivre… Prochain épisode le Dimanche 29 Novembre…