ÉPISODE 8 : MAEATA SE PRÉPARE À LA LIVRAISON DE SON COPAIN
Le grand jour était arrivé. Je n’ai pas dormi pendant la nuit du vendredi au samedi. J’avais rendez-vous à la boutique à 11 heures. Je me suis levée à quatre heures, j’ai avalé un premier café, puis je me suis lovée dans mon fauteuil préféré, une espèce de gros fauteuil qui a traversé les générations et qui me vient de mon arrière-grand tante. Incroyablement confortable, ce fauteuil a recueilli mes états d’âme pendant des années. J’ai rêvassé pendant quelques heures, et je suis allée prendre une douche quand mon ordinateur général de l’appartement a annoncé qu’il était huit heures et qu’il était temps pour moi de me préparer. Je me suis permise de l’insulter :
– Mais t’es qu’un con ! J’ai rendez-vous seulement à onze heures, pourquoi veux-tu que je me prépare maintenant !
Il a répondu, le grossier personnage, alors que je lui ai expliqué maintes fois qu’il me devait une obéissance totale à moi, sa superviseuse. Je l’ai même menacé de le rapporter au fabricant et il a osé simuler des pleurs comme s’il avait une parcelle de vivant. C’est dingue ce que les robots se permettent parfois.
Ceci dit, je suis allée à la salle de bains après avoir bu un autre café. J’ai appuyé sur le système automatique que j’ai appelé Merlin*, et l’eau a ruisselé sur mon corps à une température parfaite puis le bras m’a frictionnée en douceur. J’ai demandé un gommage et Merlin a réalisé gommage soigné puis il m’a séchée et m’a passé une crème sur le corps. Je suis passée ensuite au visage, j’ai mis en route le gommage puis la pose de la crème en lui recommandant de faire attention à mes yeux :
– N’oublie pas que je suis une humaine, et pas une moitié robot. Mes yeux sont fragiles, ce sont des vrais.
– Ils sont très beaux.
– Merci Merlin, tu es gentil. Tu sais que je vais chercher mon nouveau copain ?
– Ah ?
– Je ne t’ai pas mis au courant, excuse-moi, tu devras lui obéir à lui aussi, mais peut-être que pour toi, ce sera plus facile de le comprendre car il n’est pas humain, lui.
– Très bien, je lui obéirai mais si tu me demandes quelque chose et lui aussi en même temps, que devrai-je faire ?
Je suis restée bouche bée, je n’avais pas pensé à ce genre de situation, et après avoir réfléchi, j’ai répondu :
– On verra si cela se pose mais à mon avis, elle ne se posera pas parce que c’est un gentleman, le copain, cette qualité fait partie des qualités que j’ai commandées. Il m’accordera toujours la préséance. Bon, tu me maquilles ?
– Qu’est-ce que tu veux ?
– Un maquillage d’actrice.
– OK, c’est parti, tu ne te reconnaîtras pas.
– Tant mieux, il faut que je lui fasse bonne impression.
– Ce n’est pas la peine, il te trouvera exquise quelle que soit ton apparence, c’est un robot, il est programmé pour te faire des compliments et pour t’être agréable en tous points.
La remarque de Merlin m’a stressée, je n’étais pas suffisamment habituée aux compliments et à l’idée d’en recevoir toute la journée, je me suis demandé ce que cela provoquerait chez moi…
Une fois maquillée et coiffée, je me suis regardée dans la glace en quatre dimensions où je pouvais m’admirer sous tous les angles de ma petite personne, aussi bien de dos que de devant, et des côtés. J’ai souri, j’étais belle, vraiment attrayante, j’allais lui plaire. En me disant ces mots, je me suis souvenu que je ne lui avais toujours pas donné de prénom, aussi j’ai cherché très vite dans la liste des prénoms bretons que me renvoyait mon écran, lesuel pourrait lui convenir. Il était grand, blond, il avait les yeux bleux, il lui fallait un prénom du Nord. Je me suis arrêté à Halidor, que j’ai trouvé superbe et bien assorti au mien, j’ai répété, Maeata et Halidor, Halidor et Maeata. Il y avait un tréma sur le O, mais je l’’ai supprimé, jugeant que ce serait trop compliqué pour lui et pour moi et que cela risuqait de perturber nos connaissances, nos amis. Il fallait maintenant que je procède à mon habillage. Je me suis postée devant ma penderie et mes vêtements ont défilé, j’ai dit :
– Rendez-vous amoureux, première rencontre.
Tout de suite après que j’eus énoncé l’objet de ma recherche, un ensemble s’est avancé vers moi. Je l’ai décroché et je l’ai passé sans me poser de questions, moi, toute seule, je ne serais pas arrivée à me décider et j’aurais fini par mettre en retard.
Quand j’ai été fin prête, il était dix heures et demi. De mémoire d’adulte, je n’avais jamais mis aussi longtemps pour me préparer. Il était temps de me diriger vers la boutique des copains. Je suis descendue de chez moi puis j’ai regardé si une voiture électrique passait par là. Je ne voulais pas aller à pied sur les trottoirs roulants ou non roulants, comme à mon habitude, parce que j’étais perchée sur des talons de dix centimètres, j’ai bu une petite voiture électrique à une place qui roulait à vide, je lui ai fait signe et elle a aussitôt suffisamment ralenti pour que je puisse monter à bord.
Une fois assise, j’ai demandé :
– La boutique des copains, à Montparnasse.
– OK, Madame, nous y serons dans huit minutes.
– Parfait.
Elle a accéléré et a glissé sur la rue toute lisse, j’ai fermé les yeux et je me suis retrouvée huit minutes plus tard, devant la façade de la boutique des copains. Mon cœur a un peu sauté mais bravement, je suis entrée.
– Bonjour chère Maeata, prenez place je vous prie, il sera ici à onze heures comme prévu. J’ai besoin de son prénom pour le baptiser avant qu’il vous voie, vous devez être la première personne à l’appeler ainsi mais il doit l’avoir dan son programme de reconnaissance vocale. Alors ; comment l’avez-vous appelé ?
– Halidor.
– Oh, c’est très joli, merci, c’est enregistré. Attendez un instant, je reviens avec lui.
Quelques minutes se sont écoulés et…
Suite au prochain épisode, rendez-vous la semaine prochaine….